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Photo du rédacteurMarie-Laure de Voghel

Histoire de l’art-thérapie


Il est intéressant de comprendre les origines de l’art-thérapie. Selon moi, cela lui permet de gagner en crédibilité et de prendre conscience de son potentiel.


C’est pourquoi j’avais envie de partager avec vous ce que j’en ai lu.


Origines de l’art-thérapie

Les origines lointaines et ce qu’il en reste aujourd’hui

Une première question à se poser serait celle de l’utilité première de l’art. Pourquoi les hommes préhistoriques dessinaient-ils dans les grottes ? Pas pour faire de l’art, comme nous le faisons aujourd’hui. Mais alors, quelles étaient les fonctions de ces œuvres ?


Les moyens d’expression utilisés à cette époque permettaient aux hommes de communiquer, et même de garder un équilibre mental en donnant forme à leurs angoisses ou leurs désirs. Ces œuvres d’art servaient aussi les rituels de l’époque.


Aujourd’hui encore, certaines populations ont des rituels à forme artistique pour soigner ou pour pratiquer leur spiritualité.


Par exemple, les Navajos, un peuple amérindien d’Amérique du Nord, utilisent des peintures pour soigner l’âme d’une personne qui a violé une loi et entrer en contact avec leurs dieux pour rétablir l’équilibre qui a été rompu.


Dans la tradition tibétaine, des mandalas de sable sont offerts aux bouddhas.


Les œuvres d’art qui naissent de ces rituels ont la particularité d’être éphémère. Elles sont détruites après le rituel, ce qui tend à démontrer que la fonction de l’art ici n’est pas esthétique mais plutôt thérapeutique.


Psychiatrie et art, à partir du XVIIIème siècle

En 1795, Philippe Pinel, médecin français, est un des leaders du mouvement des aliénistes qui permettra aux personnes considérées « folles » d’être acceptées comme des sujets de droit, c’est-à-dire des personnes à part entière. Il a mis en place des ateliers afin d’occuper les patients de l’hôpital, de les distraire et de les calmer.


Ce mouvement aliéniste utilisait aussi l’art comme un outil pour affiner les diagnostics. À la demande des médecins, des artistes, parfois les médecins eux-mêmes, faisaient des portraits des malades.


À la fin du XIXème siècle, quand les moyens de contentions ont été abandonnés, et les patients considérés comme des malades et non comme des fous, les médecins les ont encouragés à s’exprimer en créant.


En 1872, Auguste-Ambroise Tardieu, médecin légiste et professeur de médecine légale à l’université de Paris, s’est intéressé au processus de créations chez les malades mentaux. Il publia le premier ouvrage sur ce sujet, Études médico-légales sur la folie.


En 1888, Cesare Lombroso tenta de théoriser l’art des fous dans son ouvrage L’Homme de génie (L’Uomo di genio). Il y met en évidence un lien entre le fou et le génie.


L’expressionisme, l’art d’exprimer ses sentiments

Au XXe siècle arrive le courant artistique de l’expressionisme, en opposition à l’impressionnisme. L’artiste crée à partir d’un élan vital expressif venant de l’intérieur de lui-même vers l’extérieur.


Le sujet s’imprime sur l’objet en faisant preuve de spontanéité et d’immédiateté (deux notions utilisées en art-thérapie aujourd’hui) dans son expression.


L’art des fous, psychopathologie de l’expression

À la même période, trois ouvrages ont mené à reconnaître l’expression artistique dans l’art des fous.


D’abord, l’ouvrage L’art chez les fous (1907) de Marcel Réja (médecin et artiste à ses heures). Il y présente une analyse de dessins, peintures, sculptures, etc. en portant son intérêt sur le processus de création et les conditions intérieures nécessaires pour qu’il ait lieu.


Ensuite, en 1921, Walter Morgenthaler (psychiatre et psychothérapeute suisse) a publié Un artiste aliéné dédié à l’œuvre de l’artiste Adolf Wölfli et dont le but était de faire reconnaître un art de la folie par le milieu médical. Il s’est lancé dans l’écriture de cet ouvrage après des années d’analyse des productions de ses patients et d’interprétations de celles-ci.


Enfin, un an plus tard, en 1922, l’ouvrage Expressions de la folie d’Hans Prinzhorn (psychiatre allemand) est sorti. Il a sélectionné quelques œuvres parmi plusieurs milliers qu’il avait collectées pendant quelques années, pour en analyser le processus de création et le mettre en lien avec l’univers mental du malade. Pour Prinzhorn, l’œuvre n’est pas un symptôme de la maladie. Il ne pratiquait donc pas l’interprétation des œuvres (en opposition à Cesare Lombroso). Il a bâti les fondements de la psychopathologie de l’acte créateur.


Le terme « art psychopathologique » a été officialisé en 1950 lors du premier Congrès mondial de psychiatrie se déroulant à Paris. À cette occasion, Robert Volmat (médecin psychiatre) organisa une exposition regroupant plus de 2 000 œuvres de 350 malades de 16 nationalités différentes.


En 1959 a eu lieu le premier Congrès international d’art psychopathologique à Vérone en Italie. Robert Volmat y créa la Société Internationale de la Psychopathologie de l’Expression (SIPE), devenue aujourd’hui la Société Internationale de la Psychopathologie de l’Expression et d’art-thérapie.


Courants artistiques inspirés de l’art en psychiatrie

Deux courants se sont inspirés de l’art des fous :


  • Premièrement, le surréalisme qui voulait représenter le monde du rêve et de l’imaginaire. Les artistes de ce courant étaient ouverts à tout type de médium, dont l’écriture automatique qui permettrait de ne plus réfléchir et d’accéder à une part de l’inconscient, de laisser surgir les émotions et libérer l’esprit de la censure.

  • Deuxièmement, l’art brut que Jean Dubuffet a défini à partir d’œuvres de malades mentaux, d’autodidactes et de marginaux, qu’ils collectionnaient et qui étaient en rupture avec les codes académiques et sans référence artistique. Simplement nées d’un besoin vital de créer.

Naissance et évolution de l’art-thérapie

Naissance avec la psychanalyse

Freud s’est appuyé sur l’art pour sa théorie de la psychanalyse. Il a surtout analysé le processus créateur et a cherché à comprendre l’effet d’une œuvre d’art sur le spectateur. Cela l’a mené au concept de sublimation.


Alfred Adler s’est détaché de Freud en prenant en compte non seulement l’esprit, mais aussi le corps et la situation dans laquelle la personne se trouve. Sa théorie intéressera l’art-thérapie dans laquelle le corps a toute sa place.


Pour Carl Gustav Jung, ancien élève de Freud et qui s’en est éloigné, en matière d’art, il est important de laisser venir à soi les émotions et sensations, que ce soit en tant que créateur ou en tant que spectateur. Les symboles et archétypes ont une place centrale dans sa psychologie analytique. Il a beaucoup utilisé le mandala comme outil d’introspection. Il a développé la notion d’unité corps-psyché en donnant à expérimenter à ses patients l’acte de créer.


Les premières médiations artistiques en psychanalyse infantile sont apparues au début du XXe siècle. En voici quelques-unes :


  • Sophie Morgenstern (1875-1940) a introduit la psychanalyse en France et le dessin auprès d’enfants en cure dans le but de leur permettre d’exprimer sans mots (1925) ;

  • Margaret Lowenfeld (1890-1973), pédiatre et psychothérapeute anglaise, a expérimenté différents dispositifs (jeux, sable et le jeu du monde) sans interpréter les productions des enfants ;

  • Donald Woods Winnicott (1896-1971), pédiatre, psychiatre et psychanalyste anglais, a inventé le squiggle ou gribouillis : deux personnes face-à-face, chacune à leur tour, dessine un tracé libre sans recouvrir la trace de l’autre (le thérapeute commence). L’œuvre est l’objet intermédiaire dans la relation. Le jeu a une place fondamentale car il permet la créativité qui est spontanée chez les enfants.


Les pionniers de l’art-thérapie

Ils étaient médecins, psychothérapeutes, psychiatres ou encore artistes. En voici quelques-uns :


  • Adrian Hill (1895-1977) : artiste contraint par la maladie à séjourner dans un sanatorium. Il est devenu thérapeute grâce à sa propre expérience de malade. Encouragé par la Croix-Rouge, il a développé la thérapeutique par l’art dans différents hôpitaux et sanatoriums ;

  • Jacob Levy Moreno (1889-1974), médecin autrichien émigré aux États-Unis, est le fondateur de la psychologie humaniste et du psychodrame ;

  • Marian Chace (1896-1970), danseuse, et Mary Starks Whitehouse (1911-1979), psychothérapeute passionnée par la danse, ont développé la danse émotive expressive qui débouche sur la danse-mouvement-thérapie ou danse-thérapie ;

 


J’espère que cet article vous aura intéressé.e.s. J’ai essayé de résumer au mieux mes lectures, sans en changer le sens ni omettre des informations importantes. Cependant, si ce sujet vous intéresse, je vous invite à lire les ouvrages cités dans mes sources en fin d’article.

Je vous souhaite un bel été ! Au plaisir de vous retrouver en septembre.


Sources

·        L’art-thérapie – ABC, DIKANN Alain, éd. Grancher, 2018

·        L’art-thérapie, KLEIN Jean-Pierre, éd. Que sais-je ?, 12ème édition, 2023

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